Je suis venu poser ma face en la poussière des pas de mon ami.
Je suis venu demander pardon de mon oeuvre un instant.
Je suis venu reprendre service en sa roseraie.
Je suis venu mettre le feu à mes propres broussailles.
Je suis venu me purifier de la poussière de tout ce qui avait eu lieu.
J'ai compté mon bien-agir pour du mal eu égard à mon bien-aimé.
Je suis venu les yeux en pleurs pour qu'il voie mes yeux,
Mes yeux, sources de Salsabil, pleins d'amour pour ce voyou, le mien !
Bondis, ô immatériel amour, fais renaître la tendresse !
Je suis mort, vidé de toute chose, pour avoir affirmé, pour avoir nié.
Pour ce que l'on ne peut se purifier de l'existence,
si tu ne purifies
Sans toi, l'on ne peut jamais être quitte du chagrin,
de la peine.
Au-dehors je fais silence, mais tu sais qu'à l'intérieur
Je suis plein de paroles de sang en mon coeur ensanglanté.
Jette un regard, en l'état du silence, vers mon visage, regarde bien
Jusqu'à voir sur ma face cent mille traces laissés par toi.
Ce ghazal, je le ferai bref et le reste est dans mon coeur.
Je le dirai,si tu m'enivres de tes yeux, ces narcisses ivres.
Ô toi, silencieux de ton propre dire, toi séparéde ton pair
Comment es-tu devenu ainsi, muet d'admiration devant ta raison aiguë ?
Ô muet, comment es-tu devant ces pensées de feu ?
Les pensées affluent avec leurs troupes sans nombre.
Au temps d'être seul, on est muet, mais aux gens l'on parle
Car le secret de son coeur on ne le dit pas à sa porte, à son mur.
Toi, fais-tu silence de ne trouver personne ?
Ne vois-tu nul confident de ton propos ?
Es-tu du monde de la pureté ? N'es-tu du mélange avec la nature ?
Avec les chiens du monde de la nature, qui portent
la souillure de leur corps de mort ?
Rûmi
Salsabil = Sources du Paradis
Ghazal = poèmes d'amour